Autisme et déficience intellectuelle : un défi au-delà du malaise
Autisme et déficience intellectuelle à l’école : malaise ou défi?
Quand on parle d’autisme ou de déficience intellectuelle, en classe spéciale ou à l’école ordinaire, c’est souvent source de malaise ou de véritable crainte chez les acteurs impliqués. Soit les personnes ne s’estiment pas suffisamment compétentes pour intervenir auprès desdits enfants, soit elles craignent de laisser de côté les autres enfants si elles investissent trop de temps auprès de l’enfant différent. Elles peuvent aussi avoir peur, souvent à juste titre, de manquer de temps pour tout faire dans leur travail et, il faut bien l’avouer, elles peuvent redouter de s’épuiser à la tâche. Cela représente une partie des réalités bien concrètes de ce qui se passe dans certains milieux scolaires où sont présents des enfants ayant une déficience intellectuelle ou un trouble de l’autisme.
Des pas importants parcourus
Il y a déjà plus de vingt ans, débutaient les questionnements sur les meilleures conditions à mettre en place pour soutenir les milieux scolaires. On parlait alors davantage d’intégration scolaire. Des pas importants se sont faits depuis au Québec. Le concept d’inclusion de tous les élèves, à l’école ordinaire, a gagné graduellement du terrain et ne représente pas uniquement un simple cas d’exception. Cela est notamment dû au fait que, derrière chaque bout de terrain gagné, il y a des parents dévoués à la réussite de leur enfant, soucieux de faire abattre des préjugés, souvent même s’il faut recommencer année après année. Cette inclusion serait également impossible sans l’apport d’intervenants et de gestionnaires croyant au potentiel des enfants handicapés ou en difficulté d’adaptation ou d’apprentissage.
Des réponses à des besoins bien précis des enfants
On craint souvent de ne pas pouvoir bien adapter son enseignement pour répondre aux besoins de l’enfant ayant une déficience intellectuelle. On anticipe le temps que cela prendra. On se demande ce qu’il va apprendre en classe, surtout lorsque s’agrandira l’écart d’âge et de niveau de développement. Pourtant, nombre d’enseignants veulent relever ce défi.
Lorsqu’un intervenant a dans sa classe un enfant ayant reçu un diagnostic de trouble du spectre de l’autisme, son dilemme se situe souvent à essayer de comprendre le fonctionnement interne de cet enfant. Il vit parfois des craintes par rapport à ses réactions excessives, telles des colères inattendues.
Antérieurement, lorsqu’on parlait d’inclusion d’enfants autistes ou ayant une déficience intellectuelle en classe ordinaire, cela ne se faisait pas sans l’ajout, quasi systématique, d’une ressource d’accompagnement, du moins à temps partiel. Bien qu’ayant l’avantage de soutenir les apprentissages de certains enfants et de sécuriser, il faut bien le dire, certains intervenants, cela créait parfois une forme de ghetto autour de l’enfant. L’inclusion de l’enfant avec ses compagnons de classe n’en était souvent pas véritablement une.
Sans rejeter ces façons de faire, ces expériences ont amené à réfléchir à de nouvelles pratiques.
Et que nous apportera l’avenir?
Pour ne pas devoir revenir en arrière et refaire les démarches menant vers la cause de la participation sociale de tous, il faut mettre en commun les connaissances et partager les expertises. De bonnes idées expérimentées dans un milieu peuvent servir à un autre. Cela est d’autant plus important dans un contexte où la nouvelle classification des élèves s’installe, laquelle est issue du DSM-V (2013). Ainsi, on parle davantage de la présence en classe ordinaire de certains types d’enfants – que l’on pense aux enfants dyspraxiques, entre autres. Le milieu scolaire est également préoccupé par l’éventuelle augmentation du nombre d’élèves présentant un trouble du spectre de l’autisme, par exemple. Ces enfants, qui ont reçu une intervention intensive précoce, se retrouvent maintenant de plus en plus en classe ordinaire au primaire, au secondaire et même au postsecondaire. Les milieux scolaires sont-ils prêts à les accueillir? Sont-ils suffisamment outillés pour soutenir un changement dans leurs pratiques professionnelles? Sont-ils informés des retombées de certaines pratiques novatrices?
Pauline Beaupré, Ph. D., est psychologue et psychopédagogue. Professeure au Département des sciences de l’éducation de l’Université du Québec à Rimouski (UQAR) – Campus de Lévis, elle est aussi chercheure au Centre interdisciplinaire de recherche en réadaptation et intégration sociale (CIRRIS) et membre du Laboratoire de recherche sur la santé en région (LASER).
Mots-clés : déficience intellectuelle, inclusion scolaire, pratiques novatrices, troubles du spectre de l’autisme